lundi 29 juin 2009

La vie privée dans le monde du Travail : Mythe ou réalité ?


Le respect de la vie privée est un principe reconnu tant en droit interne qu'en droit international (article 9 du code civil, article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, etc...).
Mais qu'en est-il sur les lieux de travail, le salarié peut-il se prévaloir de ce principe alors qu'il est sous la subordination juridique de son employeur ?
La question peut légitiment se poser aujourd'hui avec l'utilisation des nouvelles technologies de l'information sur le lieu de travail et aussi avec l'essor des réseaux sociaux accessibles pour certains d'entre eux sur les lieux de travail dont l'utilisation est de nature à faire disparaître progressivement les frontières entre la vie professionnelle et vie personnelle.
Il faut savoir que le respect de la vie privée au travail est un principe jurisprudentiel reconnu par toutes les juridictions.

Le salarié peut également, en vertu du principe du respect de la vie privée informatique, disposer librement des outils informatiques mis a disposition par son employeur et les utiliser pendant son temps de travail. Il peut également utiliser sa messagerie professionnelle à des fins personnelles et surfer sur internet au bureau à condition toutefois qu'il ne commette pas d'abus dans l'utilisation de ces outils et qu'il respecte ses obligations professionnelles.
En effet, le salarié doit exécuter son travail en se conformant aux ordres et instructions de son employeur et en respectant ce dernier. L’employeur peut donc légitiment exiger que son salarié se concentre sur le travail convenu pour lequel il le rémunère.
L'arrêt de principe en la matière est l'arrêt Nikon c /Onof en date du 2 octobre 2001 qui a clairement énoncé le principe selon lequel le salarié, avait droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée. Dès lors, les dossiers et fichiers qu'il détenait et qui comportaient la mention « personnel » étaient soustraits du pouvoir de contrôle de l'employeur. Cette jurisprudence a été confirmée par le Conseil d'État rendant se principe applicable aux agents de la fonction publique (arrêt du 15 octobre 2003).
A partir de 2006, la jurisprudence de la Cour de Cassation va néanmoins opérer un rééquilibrage au profit de l'employeur, notamment en cas d'abus manifeste du salarié, en posant une présomption du caractère professionnel de l'activité du salarié et donc des fichiers et dossiers détenus par lui (arrêts du 18 octobre 2006). Un arrêt du 9 juillet 2008 a reconnu cette présomption s'agissant de l'usage de la connexion internet de l'entreprise par le salarié.

En tout état de cause, il existe une obligation de respect réciproque entre le employeur et le salarié et l'employeur est en droit de contrôler l'activité de son salarié. Ce n'est d'ailleurs pas seulement un droit mais une obligation s'il ne veut pas voir dans certains cas sa responsabilité engagée.

Pour conclure, il importe de souligner que les différents décisions jurisprudentielles qui ont été prises ces dernières années mais également les recommandations de la CNIL montrent bien l’ébauche d’un nouveau droit au respect de la vie informatique du salarie tout en accordant des garanties à son employeur. Le salarié est tenu d’une obligation de loyauté vis- à-vis de son employeur mais en cas d’abus, la sanction s’en trouverait justifiée. Il convient de souligner qu'au regard de ces évolutions jurisprudentielles, document important permet de fixer les règles du jeu: il s'agit de la charte informatique qui revêt alors un rôle crucial surtout lorsqu’elle est annexée au règlement intérieur de l’entreprise.
Enfin, soyons vigilant a tout intrusion législative dans ce domaine qui risque de perturber cet équilibre de bon sens déterminé par la jurisprudence.

dimanche 28 juin 2009

Le droit au respect de la vie privée :


Le droit au respect de la vie privée, en quoi consiste-t-il ?


La notion de vie privée était inconnue des Anciens et ignorée au Moyen Age. Il s’agit d’une notion qui accompagne l’invention de la modernité politique et provient de l’existence même de l’Etat moderne à partir du moment où celui-ci, pour définir l’espace de liberté laissé à l’individu, implique la distinction entre Etat et société civile. Soit la distinction entre espace public et espace privé, et encore entre vie privée et vie publique.
Elle suppose donc des droits accordés aux individus qui sont exprimés tant en droit international qu’en droit interne.

En droit international :


La vie privée est protégée au niveau international par l’article 12 de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 : « Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre telles immixtions ou de telles atteintes. »
Le droit au respect de la vie privée est également protégé par la Convention Européenne de Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH), qui est plus précise que la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948.
L’article 8 de cette convention précise que :
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».
Il ne peut y avoir d’ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté, au bien- économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à al protection des droits et libertés d’autrui.
En droit interne :

Il faut savoir que les droits de la personnalité n’ont véritablement commencés à être garantis qu’aux alentours des années 60 et uniquement par la jurisprudence car, pour que le code civil consacre ces droits primordiaux, il a fallu attendre une loi de 1970 ! (Le Conseil Constitutionnel considérait que le droit à la vie privée découlait de la liberté proclamée par l’article 2 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyens de 1789)
Aujourd’hui, la protection de l’intégrité morale de la personne est assurée. C’est la loi du 17 juillet 1970 tendant à renforcer la garantie des droits individuels des citoyens qui a introduit dans le code civil une disposition selon laquelle : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. » (article 9 du code civil alinéa 1) et donne au juges les moyens de faire cesser, le cas échéant en urgence, toute atteinte à la vie privée.
La difficulté réside dans le fait que la notion de vie privée n’est pas définie par la loi. On estime cependant, en droit français que la vie privée englobe la vie familiale et conjugale, la vie quotidienne à domicile, l’état de santé de la personne, sa vie intime, amoureuse, ses relations amicales, ses loisirs ainsi que sa sépulture.
En cas d’atteinte à la vie privée, quelles sont les sanctions encourues ?
L’auteur de l’atteinte encours alors deux sortes de sanctions civiles qui peuvent lui être appliquées cumulativement : la réparation en argent à titre de dommages et intérêts mais aussi l’interdiction de publication par exemple. La loi prévoit en effet que les juges peuvent ordonner « toute mesure telle que séquestre, saisie ou autre propre à empêcher ou faire cesser une atteinte à l’intimité de la vie privée (article 9 alinéa 2 du code civil).
Il existe aussi des sanctions pénales aux atteintes à la vie privée : L’auteur peut encourir l’emprisonnement et une amende conséquente.
Et au travail, comment ça se passe ?

Le salarié a droit au respect de sa vie privée même lorsqu’il est au travail sous l’autorité de son employeur.
Le salarié doit en effet exécuter sont travail en se conformant aux ordres et instructions de son employeur et en respectant ce dernier tout comme les convenances, les bonnes mœurs, avec soin, probité et conscience au temps, lieu et dans les conditions convenues.
L’employeur peut donc légitiment exiger que son salarié se concentre sur le travail convenu pour lequel il le rémunère. Par ailleurs, le travailleur reste même au travail un être privé qui a droit au respect de sa vie privée, de son intégrité physique, psychique, ….Il existe donc une obligation de respect réciproque entre le employeur et le salarié.
L’arrêt de principe est l’arrêt de la chambre sociale du 2 octobre 2001 de la Cour de Cassation, Société Nikon France contre Onof
Le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée. Celle-ci implique en particulier le secret des correspondances. L’employeur ne peut dès lors sans violation de cette liberté fondamentale prendre connaissance des messages personnels émis par le salarié et reçus par lui grâce à un outil informatique mis à sa disposition pour son travail et ceci même au cas où l’employeur aurait interdit une utilisation non professionnelle de l’ordinateur.

A lire :
Naissance et avis de décès du droit à la déconnexion : le droit à la vie privée du XXI ème siècle, Jean- Emmanuel Ray, Droit social n°11, du 1er novembre 2002.
NTIC et vie personnelle au travail, Antonmattei, Paul-Henry, droit social n ° 1, du 1er janvier 2002